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LE NUMÉRO PERSISTANCE RÉTINIENNE

Lâchez les colombes

Le lendemain du Nouvel An, on a reçu cet email : « Hé les mecs vous connaissez LA nouvelle drogue que tout le monde prend à Paris ? Ca s’appelle NeoDove, ça coûte 5 euros, ça s’achète sur Internet...

La formule chimique de la joie selon Steven

Le lendemain du Nouvel An, on a reçu cet email : « Hé les mecs vous connaissez LA nouvelle drogue que tout le monde prend à Paris ? Ca s’appelle NeoDove, ça coûte 5 euros, ça s’achète sur Internet et c’est en train de détrôner la coke dans les garden parties à la mode. Il y a même des fêtes qui s’organisent uniquement autour de cette petite pilule bleue et blanche. Ce qui est rigolo, c’est que ce truc est dans un non-lieu juridique en France : ce n’est pas « illégal », c’est juste « pas légal ». Enfin, tous ceux que je connais qui en ont pris ont trouvé que c’était juste la meilleure dope du siècle, toute douce et sans descente le lendemain. C‘est une drogue assez hippie, tu deviens très love et tu as envie de faire des câlins à l’univers entier. Voilà. » On a donc écrit à notre ami Dom, qu’on appelle prof parce qu’il a dû tester à peu près toutes les drogues jamais synthétisées par l’homme. « Hey Dom, t’as entendu parler du NeoDove, qu’est-ce que t’en penses ? » La réponse ne s’est pas fait attendre : « Carrément. Tout le monde carbure à ça à Paris, mais c’est de la merde. Une sorte de sous-MDMA. Il y a eu des accidents au Danemark à cause de la vasoconstriction. Des mecs, on a dû leur amputer les doigts. Mais tu sais, il y en a des centaines d’autres, des molécules en plein flou légal – Ah ? OK, ben t’as qu’à nous écrire un papier sur ces drogues-là. » Voici ce qu’il nous a envoyé. Avec l’explosion de la demande des legal highs, un nombre grandissant de fournisseurs ayant pignon sur Internet habillent et marketent des vieilles synthèses de stimulants péraves, remisés dans les tiroirs de leurs créateurs depuis cinquante ans. Et, contrairement à ce que l’on pourrait ­croire, aucune de ces substances n’est légale en France… MEPHEDRONE
Formule chimique : (RS)-1-(4-methylphenyl)-
2-methylaminopropan-1-one
Noms courants : Meph, Drone, Meow, Bubbles … à commencer par le 4-methylmethcathinone, appelé aussi mephedrone, la principale molécule présente dans ces pilules NeoDove de merde. À l’origine, ce stimulant a été synthétisé afin de vider plus rapidement les vésicules de sérotonine des rats et ainsi les rendre dépressifs, histoire de pouvoir tester sur eux tout un tas de nouveaux antidépresseurs. Bon, si ça marche pour les rats, ça peut pas nous faire de mal, hein ? Commercialisées à l’origine par une firme israélienne, Neorganics, sous le nom de Hagigat, ces pilules commandées sur Internet, livrées en quatre jours, ont fait les nuits des clubbers israéliens – et se sont fait interdire – bien avant que les NeoDove, Spirit et autres SubCoca ne déferlent sur Paris. D’après des journaux scandinaves et britanniques, plusieurs morts seraient directement liées à une utilisation massive de ces produits. L’effet est comparable à une légère montée de MDMA et dure une trentaine de minutes, sauf que la mephedrone, c’est super addictif, et tu te sens rapidement dans l’impossibilité de passer un week-end sans prendre une dizaine de ces pilules. Enfin, ça a été mon cas. Et puis le corps fait son rétrocontrôle, les effets durent de moins en moins longtemps et les descentes deviennent épouvantables. Et il y a aussi la fatigue extrême, qui t’oblige à faire des pauses à chaque palier d’un escalier. Un peu comme un vieux. Un vieux rat déprimé. MDPV
Formule chimique : (RS)-1-(benzo[d][1,3]dioxol-5-yl)-
2 (pyrrolidin-1-yl)pentan-1-one
Noms courants : Methylenedioxypyrovalerone,
MDPV, Pyro L’autre grand gagnant du concours des plus grands stimulants de merde de l’Histoire, le MDPV, (une pyrovalérone, d’où son petit nom de dragon rigolo, Pyro), est un inhibiteur de la recapture de la noradrénaline et de la dopamine. Si c’était un médicament, la notice énumérerait, dans la liste des effets secondaires, une stimulation du système nerveux central, une hypersexualité, de l’hypertension, de la paranoïa, de l’anxiété et de l’insomnie. On retrouve cette molécule dans un « sel de bain » (c’est sous cette désignation que sont vendues certaines de ces molécules, afin de contourner la législation) appelé Vanilla Sky, ou Ivory Wave. Ce produit a beaucoup fait parler de lui sur les forums liés aux psychotropes à cause d’histoires de surdosage, de descentes infernales, d’allers simples à l’hôpital psy avec prise en charge aux benzodiazépines. En gros, ça donne un rush dopaminergique énorme qui s’accompagne d’une envie de baiser monstrueuse et tordue. Mais, rapidement, le corps fait peur, le cœur part à 150 bpm, la respiration se fait difficile, on sue comme un porc et puis quand on veut juste dormir parce que plus rien n’est intéressant, eh ben on peut pas. Juste on fait un côté ventre, un côté dos, et la texture du drap est insupportable et on veut que ça s’arrête et quand enfin on dort, on se réveille crevé et déprimé comme une merde. Un de mes amis est resté deux jours au lit, en prise à une attaque de panique, incapable de bouger, le visage enflé et rouge comme une tomate. Le con s’était fait une petite ligne de 40 mg (soit environ dix fois le dosage conseillé) et avait tout sniffé d’un coup. 4-FMA
Formule chimique : (RS)-1-(4-fluorophenyl)-N-
methylpropan-2-amine
Noms courants : 4-Fluoromethamphetamine /4-FMA
Alors celui-là, j’ai adoré. Un peu trop, même. Cette ­molécule agit beaucoup sur la sérotonine mais reste moins neurotoxique que ses cousins halogénés (chlore, brome, iode et astate). J’ai tourné à ça pendant des mois. J’ai parfois pu me branler six jours de suite, sans dormir et en n’éjaculant qu’une seule fois au bout de ces six jours, avec des pauses boulot où je me rendais comme un zombie. C’est presque aussi bon que la meth et ça m’a fait la même gueule de junkie. Je me souviens même d’avoir fait de la sulfhémoglobine ce coup-là : j’étais tout vert. Les lèvres vertes, le bout des doigts vert, les cernes verts. Après, j’ai dû dormir une semaine et j’ai eu une grosse dépression durant tout le mois qui a suivi. Je n’arrive plus à me procurer cette molécule, enfin je cherche pas trop non plus. METHYLONE
Formule chimique : 2-méthylamino-1-(3,4-méthylène­dioxyphényl)propan-1-one
Noms courants : BK-MDMA, M1, Methylone C’est la version béta-cétonique de la MDMA, un véritable empathogène et entactogène, moins neurotoxique que cette merde de mephedrone. Et ça rend heureux bien plus longtemps. Je me charge en antioxydants après la prise, le stress oxydatif de cette cétone est très important. Genre un litre de thé vert, c’est bien. Et quand je prends de la méthylone, j’utilise la plante iboga, ça agit comme neuroprotecteur. Petite activité inhibatrice de la monoamine oxydase A. Avec de grosses doses de méthylone, j’ai eu des hallucinations visuelles en fin de trip. Toujours les mêmes. En gros je vois des textes et des dessins sur à peu près toutes les surfaces qui m’entourent. Les textes sont complexes et composés d’une multitude de signes et d’icones. Ça ressemble à une sorte de code incroyable. À chaque fois que j’essaye de me concentrer sur ces signes, ils disparaissent. Je vois des idéogrammes chinois d’une précision incroyable, des grilles de sudoku… On appelle ça de l’imagerie eidétique, soit des images hallucinatoires caractérisées par leur très grande netteté. Bref, ça doit stimuler la mémoire photographique. De la même façon, il m’est arrivé de voir l’environnement entier autour de moi disparaître. Un exemple, je suis dans ma chambre, il n’y a que la lumière du téléviseur, je suis couché dans mon lit. D’un coup, je suis dans un chalet, je vois un feu de cheminée, c’est impressionnant. Il faut vraiment que je concentre mon regard – parce que la méthylone me donne également beaucoup de ­nystagmus (ndlr : le nystagmus est une perturbation de la coordination des muscles de l’œil) – pour voir les vrais murs de ma chambre réapparaître. Je n’ai jamais eu d’hallucinations aussi vivaces et réalistes qu’avec ce produit.