La fois où U2 a viré les Alouettes du Stade olympique
U2 en 1997. (Photo : Paul Bergen/Redfern/Getty Images)

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LA CULTURE DU FOOTBALL

La fois où U2 a viré les Alouettes du Stade olympique

La petite histoire du déménagement de l’équipe à l’Université McGill.

Les Alouettes de Montréal ont invité VICE à passer la saison 2018 au sein de l’équipe. Notre dossier spécial sur la culture du football est disponible ici.

Steve Charbonneau se souvient de son premier match avec les Alouettes de Montréal comme s’il l’avait joué hier. C’était en 1997, au Stade olympique. Cette année-là, l’ancien joueur de ligne défensive vient de terminer sa carrière universitaire aux États-Unis, où le football collégial attire facilement des foules de dizaines de milliers de personnes à chaque partie. Il sait que le football professionnel n’est pas aussi populaire au Canada, mais quand il arrive à Montréal, c’est le choc.

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« On joue une partie de football professionnel, on lève les yeux vers les estrades et il y a seulement 3000 ou 4000 personnes, se souvient-il. On ne savait plus où on était, dans quoi on s’était embarqué. […] C’était tellement vide que l’écho faisait résonner nos voix […]. On était capable de les compter. Au moins, on connaissait bien notre public! »

Avec une moyenne de 9585 partisans par partie pour 66 000 sièges, la faible affluence au Stade olympique est frappante.

« À un moment donné, on se demandait si le monde était au courant qu’on jouait, ou s’ils ne savaient même pas qu’il y avait une équipe professionnelle à Montréal », explique Danny Maciocia, l’entraîneur-chef des Carabins de l’Université de Montréal et ancien entraîneur des porteurs de ballon (1996-1999), entre autres, des Alouettes.

« [L’ancien président des Alouettes] Larry Smith allait dans les centres commerciaux, dans les parcs, sur les terrains de football, se souvient Bruno Heppell, ancien centre-arrière des Alouettes. Il faisait tout pour aller chercher de nouveaux partisans, un par un. »

C’est le 2 novembre 1997 que l’histoire des Alouettes prend un tournant inattendu. Ce jour-là, l’équipe reçoit les Lions de la Colombie-Britannique pour un match des séries éliminatoires. Mais problème, la même journée, le groupe irlandais U2 est attendu à Montréal pour donner un concert au Stade olympique. La décision est prise. U2 jouera au Stade, et les Alouettes devront se trouver un stade de remplacement, un stade en piteux état : le stade Memorial Percival-Molson de l’Université McGill.

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« Quand on a appris la nouvelle, on n’y croyait pas, se souvient Maciocia. On était obligés de déménager à cause d’un seul concert, une seule soirée, alors qu’on jouait là-bas depuis des années! »

Le Stade Pervical-Molson en 1997. (Photo : Mark Weightman)

« Le stade Percival-Molson était dans un état lamentable à la fin des années 90, explique Charbonneau. C’était un vieux terrain en gazon synthétique. Il y avait plein d’affaires vétustes. Il y avait un arbre, ce fameux arbre que personne ne voulait couper en plein milieu des estrades! Mais au moins, au niveau ambiance, quand t’as un stade gros comme une cabine téléphonique, ce n’est pas dur à remplir. »

Même les installations conçues pour les joueurs étaient inadéquates. « Je me rappelle que le vestiaire était minuscule. Ce n’était vraiment pas fait pour des pros. Ça faisait penser à la chambre de hockey d’un très vieux aréna. C’était serré. Certains joueurs devaient s’asseoir sur des chaises pliantes, on se marchait pas mal sur les pieds. »

Malgré tous ces désagréments, pour la première fois depuis leur retour à Montréal après une absence de neuf saisons, les Alouettes jouent devant 16 252 partisans ce 2 novembre 1997. Pendant que les chansons de U2 résonnent au Stade olympique, une partie inoubliable se joue au Stade Molson, qui marquera un tournant majeur dans l’histoire de l’équipe. Depuis, les Alouettes y disputent tous les matchs de la saison régulière. Et, bien heureusement, le stade a été rénové au cours des années suivantes.

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Le public est également de retour dans les estrades. « Au Stade olympique, on disait souvent : “Il y a beaucoup de gens déguisés en chaises vides”, plaisante Danny Maciocia. [À McGill], c’était comme un genre de happening, alors c’est sûr qu’on était tous très excités. »

Le Stade Percival-Molson en 2002. (Photos fournies par les Alouettes.)

Depuis le déménagement, les sièges se remplissent plus facilement au stade Molson, mais aussi au Stade olympique lors des matchs de séries éliminatoires. Les partisans ne sont plus déguisés en chaises vides.

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« On est revenus au Stade olympique quelques années après pour jouer les matchs de la finale de l’Est, dit Heppell. J’ai joué devant 7000 personnes au stade Molson et là, je jouais devant 66 000 personnes. Puis, je peux dire que, quand tu es au milieu d’un stade plein au Stade olympique, face à 66 000 personnes, c’est incroyable. Ça résonne en dessous de tes pieds. J’étais sur le kick-off en train de me dire, c’est malade cette histoire-là! »

C’est finalement ce concert de U2 qui aura été l'élément déclencheur qui a propulsé les Alouettes à leur niveau de popularité actuel. Sans amertume, pour rendre hommage au groupe irlandais, l’équipe des Alouettes a joué pendant plusieurs années la chanson Sunday Bloody Sunday avant chaque partie à domicile.

Safia Ahmad est sur Twitter.