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Si je devais perdre mon job du jour au lendemain pour cause de « productivité trop faible », un millier de questions seraient susceptibles de traverser mon cerveau d'ex jeune cadre dynamique. Comment vais-je payer mon appart ? Comment vais-je manger ? Comment vais-je payer mon prêt étudiant ? Ma copine va-t-elle rester avec un mec qui vient de se faire lourder ? Combien vais-je toucher d'allocs ? Comment ça marche ? On entre dans l'inconnu. Et l'inconnu, c'est toujours mieux quand on a un compte en banque bien rempli. Sans travail, je m'imagine rester chez moi à me refaire les 9 saisons de X-Files avec des pizzas, perdre mes potes par manque de stimulation intellectuelle et voir ma copine se marier avec un trader américain aux dents excessivement blanches. Mais après avoir flippé pendant une bonne journée, je reviendrais probablement à la raison grâce à l'existence de Pôle Emploi. Oui, être au chômage en France est parfois mieux que d'avoir un job dans d'autres pays. Il n'y a pas beaucoup d'endroit sur cette planète où vous pouvez toucher 70 % de votre salaire pendant plusieurs mois sans rien foutre, à l'exception de quelques rendez-vous inutiles. Finalement, perdre mon job me mettrait la pression, mais pas trop non plus. J'en profiterais pour faire le classique « Allez, je me donne un mois et après et je cherche un nouveau job ». Présenté comme ça, le chômage aurait presque l'air cool. Ce serait une sorte de pause intellectuelle où je pourrais réfléchir au sens de ma vie et terminer tous mes jeux vidéo inachevés par manque de temps. Avec du temps libre et des allocations qui tombent tous les mois, je pourrais me balader la journée, faire mes courses quand tout le monde bosse, jouer au foot quand tout le monde bosse et dormir quand tout le monde bosse. Des vacances, en somme.Article associé : Le guide VICE du chômage
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Perdre mon job, ce serait surtout me retrouver seul comme un con. Mes amis sont comme 99,9 % des jeunes travailleurs : ils bossent la journée et regardent Game of Thrones en commandant un plateau de sushis le soir. Au-delà de toute considération financière, ce qui m'inquiète avant tout dans le chômage est la solitude qui en découle. Quand on pense solitude, on pense aux personnes âgées qui attendent toute la journée le cul sur leur fauteuil que quelqu'un daigne venir les voir. Sauf que, selon une récente enquête, les chômeurs seraient beaucoup plus touchés par la solitude que les petits vieux. La solitude me fait bien plus flipper que de ne plus avoir d'argent. Crever tout seul chez moi devant l'interface du site de Pôle Emploi est la pire chose que je puisse imaginer. Après réflexion, le chômage semble être un véritable cancer social, un monstre qui peut détruire n'importe qui et qu'il vaut mieux tuer le plus vite possible. Par tuer, j'entends : trouver un nouveau job qui ne donne pas envie de se trancher la jugulaire tous les matins – ou bien faire le choix de ne pas travailler et d'en accepter les conséquences.En imaginant le chômage comme la pire chose qui puisse nous arriver, on place alors le travail comme un instrument essentiel de notre bonheur. Pourtant, avec près de deux millions de smicards en France – sans compter les millions de travailleurs qui gagnent quelque cinq euros de plus que le SMIC –, le travail n'apporte probablement que peu de bonheur à la plupart des gens de ce pays. Il paraît donc absurde de continuer de l'imaginer comme la chose la plus importante de notre vie. Certains pays européens l'ont compris et font depuis preuve d'un peu plus de courage que nous, comme la Finlande avec son revenu inconditionnel. Si vous souhaitez gagner plus d'argent ou simplement parce que vous aimez votre boulot, libre à vous de travailler. Cette idée qui risque de faire imploser les fétichistes des heures sup remet évidemment en cause le travail comme seul intégrateur social en proposant une société où il est un choix et non une contrainte qu'il faut subir à tout prix. Il n'est plus question de se prostituer devant n'importe quel recruteur pour un boulot de merde, mais plutôt de dignité et de respect de soi. Surtout, il n'y aurait plus de chômeurs mais simplement des branleurs.Suivez Paul sur Twitter.« Finalement, être au chômage provoquerait la même cassure sociale que si j'étais alcoolique ou junkie. »