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Culture

Ce que la mort de MusiquePlus veut dire pour moi

Je suis très, très nostalgique de l’époque de « Plus sur Commande ».
Musique Plus

On apprenait cette semaine qu’après 33 ans, la chaîne de télé MusiquePlus fermerait ses portes l’automne prochain. Rachetée par Groupe V Média en 2013, ça faisait déjà quelque temps que les jours de gloire de M+ étaient passés. Il faut dire qu’avec la naissance de YouTube, les chaînes spécialisées en diffusion de vidéoclips ont été rendues assez obsolètes. M+ a donc choisi de suivre le modèle de MTV, et de se reconvertir dans la diffusion d’émissions de téléréalité et d’autres types de contenu qui n’étaient pas vraiment liés à la musique.

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Mais MusiquePlus, c’était plus qu’une chaîne qui passait des clips. C’était aussi un vecteur important pour le monde de la musique au Québec. Cette chaîne, à elle seule, faisait vivre toute une industrie. MusiquePlus prenait des risques que jamais les radios québécoises grand public n’auraient pris. Ç’a été un tremplin pour pas mal de gens, et, bien que la chaîne ait passé les dernières années dans un état végétatif, je ne peux m’empêcher d’avoir un pincement au cœur en réalisant qu’on va bientôt l’enterrer de manière définitive.

Comme la plupart des Québécois de la mi-vingtaine, ma jeunesse a été bercée par MusiquePlus. Mon éducation musicale s’est pendant longtemps faite avec l’aide de la programmation de la chaîne, et il n’y a absolument aucun doute pour moi que, sans M+, je ne ferais pas ce que je fais aujourd’hui.

Ma passion pour le punk est intimement liée à M+, et surtout à 123 Punk!, l’émission de Réjean Laplanche par laquelle j’ai appris à connaître NOFX, No Use For a Name et The Bouncing Souls. Mon frère et moi attendions impatiemment les critiques de Denis Talbot à M Net avant d’aller acheter de nouveaux jeux. J’ai appris à chier sur la musique que je n’aimais pas avec classe, grâce à Claude Rajotte. Mon amour des sports extrêmes était motivé par S.P.A.M.

Mais par-dessus tout, il y avait Plus sur commande. Du lundi au jeudi, l’émission présentait de nouveaux clips, autant d’artistes de la relève que d’artistes grand public, et c’était au public de voter pour les chansons qui allaient passer. Il y avait des concours, des performances de certains des plus grands artistes de l’époque et, surtout, un public sur place. Dans les studios mythiques du coin de Sainte-Catherine et de Bleury, au centre-ville de Montréal, on pouvait réserver sa place et assister à l’enregistrement de l’émission, diffusée en direct.

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L’école où j’allais n’étant pas loin des studios (qui eux aussi vont disparaître), je me suis mis à aller aux enregistrements de Plus sur commande quand mes artistes préférés étaient de passage. C’est là que j’ai pu rencontrer pour la première fois beaucoup de mes artistes préférés, comme My Chemical Romance ou Story of the Year, dont certains avec qui je suis encore en contact aujourd’hui. J’y ai aussi rencontré les membres de mon band. Très vite, je me suis mis à y aller même quand aucun artiste n’était invité. Parfois même, j’étais essentiellement seul sur le plateau, avec Nabi et Izabelle (et plus tard Mathieu). Vers la fin, c’était rendu que je ne le disais même plus à mes parents : si je n’étais pas rentré à la maison après l’école, ils ouvraient la télé, me voyaient à Plus sur commande et étaient rassurés.

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Ç’a été les débuts, pour moi, de ce qui deviendrait une carrière en médias, comme chroniqueur musical. J’avais un million de questions sur le monde de la musique et sur le fonctionnement d’un plateau de télé. Et tout le monde à MusiquePlus était généreux de son temps et dans ses réponses.

Grâce à MusiquePlus, j’ai pu voir certains des artistes les plus importants de la scène musicale grandir, de Fall Out Boy à Drake et à Taylor Swift. Mais aussi des artistes locaux, comme Malajube ou Marie-Mai, dont les carrières ont pu progresser grâce au public que pouvait leur apporter MusiquePlus. Aujourd’hui, un tremplin comme ça, ça n’existe plus, et on pourrait bien sûr débattre sur la question de savoir si c’est une bonne chose pour la diversité musicale. Mais le fait est que c’est une industrie complète qui est morte.

Bien que notre scène culturelle reste vibrante et en vie, je suis d’avis qu’il va falloir trouver un moyen de combler le vide si on veut garder notre scène musicale en santé et durable. Parce que ce n’est certainement pas YouTube ou Spotify qui le fera pour nous.

Billy Eff est sur internet ici et .