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Culture

Les Leafs sont comme les Canadiens en 1986

Il y aura une parade au Canada cette année. Mais elle ne sera pas sur la rue Sainte-Catherine. Elle sera sur King ou Queen ou Dundas ou Spadina.

C'est difficile à avouer, mais je dois le dire haut et fort pour espérer guérir un jour : je prends pour Toronto. Oui, moi, fier Montréalais tatoué du logo de la Sainte-Flanelle, chanteur d'un groupe qui porte le nom de LA rue montréalaise, j'ai sauté et crié de joie quand Tyler Bozak a marqué en prolongation lundi soir pour donner les devants 2-1 aux Maple Leafs dans leur série contre les Capitals de Washington. Et, malgré leur victoire mercredi, les Capitals savent très bien que les Leafs ont contrôlé la partie. Cinq minutes de plus au cadran et ils perdaient. Washington ne peut que choker.

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Mon amour pour Toronto ne date pas d'hier. J'y allais quand j'étais jeune pour visiter des cousins anglos qui trouvaient fucking drôle le mot brocoli quand il est prononcé en français et qui possédaient un Seadoo avant tout le monde. J'aimais bien aller voir les Jays au SkyDome (mais je prenais pour les Expos pareil) et je trouvais ça ben cool de manger des hot-dogs sur la rue avec toutes les garnitures du monde entier. Des bacon bits dans un hot-dog? Oui, svp, monsieur le génie culinaire.

Ensuite, ç'a été les shows avec mes bands. J'ai survécu à plusieurs nuits torontoises où je me suis dit : « Crisse, quand Guy A. Lepage dit que c'est plate Toronto à Tout le monde en parle, j'imagine qu'il n'est jamais venu ou qu'il ne sait pas c'est quoi, avoir du fun » tout en prenant une shot de Fireball.

Après, ç'a été le tour des Blue Jays de me charmer sans que je les voie venir. Quand mon fils a commencé à jouer au baseball, j'avais recommencé à suivre ça pour savoir qui étaient les nouveaux Jose Canseco et comprendre les nouvelles techniques, pis BOOM, je suis tombé amoureux. Je me suis mis à regarder toutes les parties, à acheter de la merch et à prendre pour eux.

Même chose avec le basketball. Mon fils jouait et j'ai voulu en savoir plus. J'ai juste eu besoin de voir jouer le beau Demar Derozan et c'était fini. Ce jeune puma au regard mystérieux a tout de suite fait de moi un fan des Raptors. J'ai maintenant une dizaine de pièces de vêtement à l'effigie d'une équipe torontoise, mais une simple calotte du CH. En route vers la trahison suprême.

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Jusqu'à tout récemment, il me manquait juste de l'amour pour les Maple Leafs pour boucler la boucle. C'est que les Leafs sont plus tough à aimer. C'est trop le fun de les haïr et, dans les dernières années, c'était trop facile. Peu importe ce qu'ils faisaient, ils restaient poches. Ils me faisaient penser à ces personnalités hollywoodiennes qui essayent de ne pas vieillir à grands coups d'implants et d'aiguilles pour enfin toujours rester laides, souvent plus qu'elles l'étaient avant. C'était ça, les Leafs.

Mais je le dis et le dirai une seule fois : les Maples Leafs de Toronto gagneront la Coupe Stanley en 2017. Juste en écrivant la phrase, j'ai eu un gros reflux gastrique de mon shake matinal. La raison est simple : les Leafs de 2017 sont les Canadiens de 1986.

Cette année, 12 joueurs âgés de moins de 24 ans ont enfilé le chandail des Leafs au moins une fois au cours de la saison, dont trois qui n'avaient jamais mis le pied dans un vestiaire de la LNH. Chez les Canadiens en 1986, on comptait 16 joueurs âgés de moins de 24 ans, dont huit qui n'avaient jamais joué dans la LNH auparavant.

Dans un cas comme l'autre, l'équipe était loin d'être la favorite au début des séries : en 1986, les Oilers étaient premiers avec 56 victoires et 119 points au classement; cette année, ce sont les Capitals qui ont terminé au sommet de la ligue avec 55 victoires et 118 points.

Comme lors des deux dernières conquêtes de la Coupe des Canadiens, beaucoup de matchs semblent se terminer en prolongation. Qui de mieux que des jeunes avec rien à perdre et tout à gagner – tel un Claude « Overtime » Lemieux – pour marquer en prolongation?

Les ultimate underdogs. C'était ça, les Canadiens en 86, et c'est ça, les Leafs cette année. Ça me fend le cœur de le dire, mais si le CH joue une série contre les Leafs, il n'a aucune chance.

Toronto, en ce moment, c'est l'apothéose du mouvement jeunesse de la LNH. Trop rapides, fringants, presque arrogants. Les deux kids, Matthews et Marner, chantent Livin' on a Prayer sur le banc, relax, avant de sortir des tours de magie qui feraient rougir Stéphane Richer.

Même la foule ne se peut plus. Comme un gars qui n'aurait pas fourré depuis huit ans et qui se ferait inviter dans un tout-inclus aux Bahamas par une pornstar. Ils explosent et ça transporte l'équipe sur la glace.

Ça me fait chier, moi aussi, mais c'est inévitable. Il y aura une parade au Canada cette année. Mais elle ne sera pas sur la rue Sainte-Catherine. Elle sera sur King ou Queen ou Dundas ou Spadina. (Je ne sais pas où ils font leur parade, eux : ça fait 500 ans qu'ils n'ont rien gagné.) Je vais y aller la regarder en mangeant un gros hot-dog de rue rempli de bacon bits avec ma camisole de Derozan et ma calotte des Jays. Et je vais brailler. Les larmes vont fucker mon maquillage de Dartman. Mais je vais mériter ce ridicule, car, oui, je l'avoue : je suis un traître.