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Food

Serveuse cosplay ne rime pas avec pute

Dans le premier café cosplay de New-York, les serveuses sont déguisées en soubrettes et s'adressent aux clients masculins en les appelant « maître ». On est allé rencontré l'une des serveuses qui —accessoirement— en a marre qu'on la prenne pour une...
Photo by Michael Miller via Flickr

Dans la catégorie des délires vraiment bizarres, les japonais s'en sortent plutôt pas mal. C'est par exemple eux qui sont à l'origine des spas à vin ou de ces parcs aquatiques où l'on peut voir nager des dauphins tout en mangeant de leur viande. Ce n'est donc pas un hasard si les restaurants cosplay sont récemment devenus hyper populaires au Japon. Dans ces adresses à thèmes, le personnel déguisé porte des costumes qui renvoient à des éléments de la culture populaire nipponne. Dans les « Maids Cafes », une des déclinaisons du restaurant cosplay, les serveuses sont habillées en soubrettes et s'adressent aux clients masculins en donnant du « maître » pour créer une proximité intime, autour d'un verre ou d'un repas. Le premier « Maid Cafe » du genre a vu le jour à Tokyo en 2001 et rencontre encore aujourd'hui un franc succès auprès d'une clientèle composée essentiellement de gros nerds fans de jeux-vidéo et d'animes japonais.

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Ces dix dernières années, certains restaurants cosplay ont pris des orientations assez douteuses. Il y a eu les chubby cafés, pour ceux qui aiment les femmes rondes, ou encore les butler cafés, où les femmes sont servies par des majordomes avec du gel dans les cheveux. Quand le premier café cosplay a ouvert l'été 2013 à New-York, il a provoqué une grosse vague de malaise qui s'est répandue dans toute la presse locale. Les propriétaires du nouveau Maid Café de New-York, en plein cœur de Chinatown, avaient probablement ouvert l'endroit avec les meilleures intentions, mais pour beaucoup, le concept d'un bar à soubrettes renvoyait un peu trop directement aux stéréotypes et aux fétichismes relatifs à l'image de la femme asiatique.

J'ai voulu savoir ce que ça faisait de travailler dans un endroit où il faut s'adresser aux clients en employant le mot « maître » et où l'on passe la journée au milieu de tableaux de chiens et de chats et d'omelettes au ketchup. Je me suis donc rendu au Maid Café de New-York pour passer un peu de temps avec Jaime Capdevilla-Santiago, l'une des serveuses, pardon, « soubrettes », qui travaille là bas à temps plein. Si elle déplore que certains clients la prennent parfois vraiment pour une pute, elle veut croire que les new-yorkais embrasseront, tôt ou tard, toutes les subtilités de la culture nippone.

MUNCHIES : Qu'est-ce qui fait la particularité du Maid Café ?

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Jaime: On donne l'impression aux clients qu'ils sont les seuls vrais rois dans leurs demeures et que nous ne sommes des petites soubrettes à leur disposition.

Quel est le rôle d'une soubrette au juste ?

On accueille les clients en disant « Okaerinasaimase, goshujinsama ! », une phrase qui veut dire « Bienvenue chez vous, maître » en japonais. Ensuite on prend soin d'eux, on joue un véritable rôle de composition. Si un client veut prendre une photo, on doit poser avec lui et faire des petits cœurs avec les doigts. On fait beaucoup de petits cœurs avec les doigts. Si un client commande un truc à manger, on dessine des chats et des chiens dans les assiettes avec la sauce, ce genre de choses. Personnellement, j'essaie de faire plein de petits sauts quand je marche pour avoir l'air plus mignonne.

Quelle est votre clientèle ?

À 80%, nos clients sont de gros nerds fans de culture japonaise qui connaissent déjà le concept de Maid café et viennent pour vivre une expérience. Les 20% restant sont des curieux qui ne comprennent pas trop et se demandent comment est-ce qu'une fille peut accepter de faire ce boulot. Je sais qu'il y en a beaucoup qui comparent notre boulot à celui d'une strip-teaseuse, par exemple. Mais ça n'a rien à voir, nous on fait dans le mignon.

Dans le mignon ?

Oui, ici, quand on dit qu'une fille est « mignonne », ça veut souvent dire deux choses : soit elle est un peu coquine sur les bords, soit c'est une gentille petite fille bien sage. La signification du mot change selon les cultures. Au Japon, on adore tout ce qui est mignon et dire qu'une femme est mignonne est considéré comme un véritable compliment.

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Comment réagissent les clients ?

Au début tout le monde était un peu mal à l'aise, y compris les clients les plus à fond dans la culture japonaise. Notre phrase de bienvenue est en japonais et comme le veut la tradition, on la récite à voix haute très fort à chaque fois qu'un client pousse la porte du café. Ça à tendance à faire un peu flipper. Quand on a ouvert, les gens rentraient, nous entendaient, faisaient demi-tour et partaient.

Est-ce que tu as déjà eu des clients un peu gênants ?

C'est assez fréquent. Un soir, on distribuait des flyers habillées en soubrettes devant le café. Un mec s'est approché un peu trop près d'une des serveuses et lui a demandé : « C'est combien pour une nuit chez moi ? ». De manière générale, il y a toujours un ou deux clients un peu lourds qui te prennent pour une pute ou se permettre de faire des trucs complètement déplacés, comme essayer de voir ce qu'il se passe sous ta jupe.

Donc il y a des clients qui pensent vraiment que vous êtes des putes ?

À chaque commande, on doit écrire le prénom du clients sur les tickets de caisse. Ça arrive souvent qu'à ce moment là, des clients nous demandent de rajouter nos numéros de téléphone perso et nos tarifs. On doit alors gentiment leur expliquer que effectivement, nous ne sommes pas des prostitués et qu'ils se sont visiblement trompés d'endroit.

Merci Jaime, à la prochaine.