Société

Le ticket-restaurant étudiant bientôt adopté ?

Un projet de loi qui ne fait pas l’unanimité doit être examiné par les sénateurs ce jeudi 10 juin.
Alexis Ferenczi
Paris, FR
ticket-restaurant étudiant
Des étudiants à Paris faisant la queue pour une distribution de nourriture, le 28 janvier 2021. Ludovic MARIN / AFP

« La place des étudiants est au resto U, pas aux Restos du cœur », s’indignait Stéphane Troussel en janvier dernier. Le président socialiste de Seine-Saint-Denis militait pour ouvrir le revenu de solidarité active (RSA) aux moins de 25 ans, insistant sur la brutale précarité imposée par la pandémie. Depuis le début de la crise sanitaire, l’alimentation des étudiants est au cœur des débats. Dire que l’État n’en fait pas assez a des allures de litote tant les cagnottes, dons et distributions de denrées à l’initiative d’associations se sont multipliés ces derniers mois pour venir en aide aux plus démunis. 

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Jeudi 10 juin, un projet de loi qui se veut une réponse aux difficultés matérielles rencontrées par les jeunes engagés dans des études supérieures doit être examiné par le Sénat. Porté par Pierre-Antoine Levi, sénateur centriste du Tarn-et-Garonne, il envisage la création d’un ticket-restaurant à destination des étudiants. Le dispositif, calqué sur celui disponible pour les salariés, permettrait d’acheter un ticket-resto pour la moitié de sa valeur (3,30 euros, soit le prix d’un repas complet en RU au lieu de 6,60 euros) et de l’utiliser pour se payer un repas ou faire des achats alimentaires.

Dans une tribune publiée par Le Monde, le sénateur Jean Hingray qui soutient ce projet, insistait lui sur la nécessité de résorber une fracture géographique : « la création d’un ticket-restaurant étudiant est aussi une réponse sociale à un problème territorial de plus en plus aigu. Le fossé se creuse chaque jour davantage entre une offre de restauration universitaire principalement urbaine, concentrée sur 801 points de vente (restaurants et cafétérias), et la montée d’étudiants résidents dans des villes de taille moyenne, voire inférieure. »

Comme le note Sud Ouest, le projet a été « resserré » pour répondre à une série d’inquiétudes soulevées lors des auditions ; « le risque de déstabilisation » du réseau des Crous, la crainte d'un recours accru des étudiants aux fast-foods et le coût particulièrement élevé d’une telle opération, si elle est généralisée à tous les étudiants (entre 2 et 3 milliards d'euros). En conséquence, le ticket-restaurant ne serait disponible que pour les étudiants qui n’ont pas la possibilité de se rendre dans un restaurant universitaire (500 000 à 600 000 concernés) et les achats alimentaires ne pourraient se faire que dans les établissements conventionnés avec les acteurs territoriaux de la vie étudiante.

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S’il est soutenu par des sénateurs de tout bord et l’Union nationale inter-universitaire (UNI), le syndicat étudiant étiqueté à droite, le ticket-resto, dans la forme imaginée par Levi, ne fait pas l’unanimité. David Assouline, sénateur socialiste, expliquait au Figaro pourquoi son groupe n’était pas favorable à la proposition de loi qui « part d'un bon sentiment, mais propose des solutions d'inspiration libérale qui ne vont pas dans le sens de ce que nous devons encourager aujourd'hui ». Du côté de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), sa présidente Mélanie Luce estimant dans l’Humanité que le ticket n’était qu’une « fausse bonne idée » risquant surtout de mettre en péril l’équilibre des Crous et favorisant le secteur privé.

En février dernier, Anne-Laure Blin avait déposé une proposition de loi similaire, préconisant la création d’un ticket-restaurant à destination des étudiants boursiers ou non. La député Les Républicains rappelait dans Libération que « la fréquentation des restaurants universitaires baisse, que ça n’est plus en adéquation avec la demande des étudiants qui recherchent une restauration rapide, pratique, et qui souhaitent aussi cuisiner dans leurs appartements, pouvoir faire leurs courses et donc diversifier leur mode de consommation ».

L’idée était autant de répondre à une demande concrète des étudiants que de dénoncer l’immobilisme du gouvernement sur le sujet, les mesures prises à l’automne n’ayant jamais paru aussi faibles face aux problèmes rencontrés par les étudiants. Dans un entretien donné au Parisien le 27 mai dernier, la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, promettait que les frais d'inscription à l'université seraient gelés pour l’année à venir mais n’apportait aucune précision sur l’avenir des repas à un euro.

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