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Des fermes qui flottent sur l'eau au secours de la crise alimentaire mondiale

Avec la pisciculture, la culture hors-sol et l’énergie solaire de ses panneaux photovoltaïques, les fermes flottantes pourraient produire de la nourriture 7j/7, 365 jours dans l’année, sans même se soucier du manque d’eau, des inondations ou des...

D'ici à 2050, la population mondiale risque de battre toutes les prévisions et atteindre le chiffre exorbitant des 9,6 milliards d'individus. Pour répondre aux énormes besoins en nourriture des habitants de la planète, il faudrait que le volume de la production alimentaire totale augmente d'au moins 70%. Et pour ne pas arranger les choses, l'eau pourrait aussi venir à manquer dangereusement et devenir l'un des problèmes majeurs de la deuxième moitié du 21e siècle. Et pour ajouter à la psychose ambiante, selon un rapport du World Resources Institute, le tiers de la production alimentaire actuelle se situe — manque de pot — près de ressources en eau de la planète. Ça sent un peu la merde, non ?

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Il va sans dire qu'on est en droit de sérieusement flipper pour notre avenir et que toute proposition en mesure d'éviter un tel scénario catastrophe est la bienvenue.

Pour l'architecte Javier F. Ponce du Forward Thinking Architecture et Jakub Dycha, un de ses collaborateurs, le salut de l'humanité passe par une idée folle : la construction de fermes flottantes à grande échelle. Au cœur de leur projet, Les Smart Floatting Farms (SFF) , soit « des îlots flottants à plusieurs étages qui fonctionnent comme des plateformes automatisées de production énergétique et alimentaire. En d'autres termes, ces petites merveilles technologiques pourraient bien réussir à remédier aux problèmes rencontrés par les pays importateurs en eau et en nourriture, ou par ceux qui devront faire face à des problèmes de subsistance ponctuels, voire à des pénuries. »

« Après avoir effectué quelques recherches et regardé des documentaires sur l'avenir de l'humanité, je me suis intéressé à comment utiliser mes connaissances architecturales pour aider notre planète, explique Javier. La question de l'insécurité alimentaire et celle de la tendance actuelle super-polluante qui consiste à faire transiter des quantités massives de nourriture d'un endroit à un autre, ont particulièrement attiré mon attention ».

Si le projet de Javier a l'air de sortir tout droit d'un film de science-fiction, le concept n'est finalement pas si futuriste. En fait, il s'est même plutôt inspiré du passé : « les fermes flottantes comme on les a imaginées ont déjà existé dans l'Histoire », souligne-t-il en citant l'exemple des Mayas et de leurs Chinampas.

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Egalement appelées les « jardins flottants », ces îles artificielles étaient construites sur des lacs à l'aide de couches de végétation et de boue superposées. Les environnements humides accélèrent les cycles naturels d'irrigation et de décomposition qui rendent les sol fertiles et donc, très favorables à l'agriculture.

Autour du XIVe siècle, les Aztèques ont transformé une grande partie du lac de Xochimilco en un grand jardin flottant : c'est ce qui leur a permis de subvenir ponctuellement aux besoins en nourriture de 230 000 personnes. Quelques Chinampas existent encore aujourd'hui.

Photo via Flickr user Art Purée

Photo via Flickr / Art Purée.

« On n'est pas dans un film de science-fiction. La ferme flottante est une solution viable à prendre très au sérieux. Elle n'a pas la prétention de résoudre tous les problèmes liés à l'alimentation dans le monde ou de remplacer les méthodes agricoles traditionnelles — ce n'est vraiment pas l'idée. Le but c'est plutôt de pouvoir se reposer sur une nouvelle alternative complémentaire et compatible avec les autres moyens de production déjà en place. Une alternative qui aiderait à réduire considérablement les problèmes liés à l'insécurité alimentaire dans différentes régions du monde. »

En poursuivant la discussion, il a bien voulu nous éclairer sur le fonctionnement concret de ses fermes flottantes.

Ce monstre à trois étages accueille différents équipements agricoles. Le niveau inférieur est un sous-sol qui sert essentiellement aux activités de pêche. Il y a aussi des pontons, ainsi que des zones de chargement et de stockage et une plate-forme de transformation de la production.

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Le rez-de-sol est réservé à la culture hydroponique qui utilise une eau riche en substances nutritives et un genre de substrat constitué de laine de roche, de fibre de coco et d'argile pour nourrir les plantes et les cultures. Un système de traitement de l'eau environnante permet quant à lui d'alimenter les cultures.

Et enfin, au premier étage, on trouve des panneaux solaires, une zone de contrôle des microclimats et des outils d'irrigation. C'est ici que les choses sérieuses se passent. Du bon fonctionnement du biodigesteur au recyclage de l'eau, jusqu'à la récupération des matières organiques, tout est prévu pour assurer l'autonomie de la ferme en matière d'énergie.

Avec la pisciculture, la culture hors-sol et l'énergie solaire de ses panneaux photovoltaïques, les SFF pourraient tourner 7j/7, 365 jours dans l'année, sans se soucier du manque d'eau, des inondations ou même des catastrophes naturelles. La création de Javier offre de la nourriture en continu : on estime que la production moyenne d'une ferme flottante tournerait autour de 8 152 tonnes de légumes et 1 703 tonnes de poissons par an.

Ces structures sont idéales pour les mégapoles du futur situées en bord de mer ou pas loin d'un lac ou d'une rivière — ce qui est le cas de presque toutes les grandes villes du monde : Chicago, Tokyo, Singapour, Jakarta, Le Caire, Doha, Osaka, Bahreïn, Istanbul… la liste est sans fin.

Ces fermes vont-elles rester à l'état de concept ou pourraient-elles voir le jour, à terme, tout en étant parfaitement viable ? Le fondateur et rédacteur-en-chef de Indie Farmer, Nigel Akehurst, y croit dur comme fer : « En termes de faisabilité, je dirais que le projet est un peu ambitieux. Le projet pourrait vite devenir une réalité commerciale : la culture hydroponique donne de superbes salades, par exemple, et on peut aujourd'hui se reposer sur une bonne expertise de ces technologies. Les fermes flottantes pourraient permettre de produire une nourriture locale plus variée et plus saine ».

Quant au créateur des SFF, il reste optimiste : « Ça commence par un concept. Et ça peut potentiellement devenir une réalité. Je ne peux pas en dire plus pour le moment ».

Prends ton temps Javier, prends ton temps. Mais préviens-nous quand tu seras chaud d'aller sauver l'humanité.