parler avec ses proches racistes
Illustration : Hunter French 
Société

Comment parler à vos proches qui sont racistes

Si vous soutenez le mouvement Black Lives Matter, il est important que vous ayez une conversation franche avec votre oncle raciste.

Aux Etats-Unis, les dernières semaines ont été marquées par de terribles épisodes de violences policières. Cependant, certaines personnes semblent bien plus préoccupées par les vitrines brisées et les magasins pillés que par les décès des Noirs américains.

Si vous soutenez le mouvement Black Lives Matter, mais que vous avez des parents ou des amis un peu (voire complètement) racistes, voici comment vous y prendre pour aborder le sujet avec eux.

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Maîtrisez votre sujet

Si vos proches s'arrachent les cheveux quant au sort de ce pauvre petit commerce de proximité et que vous ne savez pas quoi dire, je vous suggère de lire l'essai de Vicky Osterweil « In Defense of Looting » paru dans The New Republic. Il corrige le mythe selon lequel une manifestation pacifique est la seule façon de se battre pour ses droits civils, et explique le lien entre la propriété, la rhétorique anti-pillage et la suprématie blanche.

Vous pouvez également lire le récent article de Kareem Abdul-Jabbar dans le LA Times, « Vous ne comprenez pas les protestations ? Ce que vous voyez, ce sont des gens poussés à bout », dans lequel l'auteur explique l'importance de faire preuve d'empathie en ce moment.

« Même si avez juste envie de crier "tu es raciste", dites plutôt "wow, ce que tu viens de dire est très raciste" et expliquez pourquoi »

Et bien sûr, tenez-vous au courant de l’actualité. Ces derniers jours, les autorités ont répondu aux manifestations pacifiques par des gaz lacrymogènes ; elles ont été incroyablement, dangereusement violentes ou simplement cruelles ; et elles ont essayé de nous faire croire que ce que nous avons vu de nos propres yeux…. ne s'est pas produit. Soyez prêts à partager des vidéos, ce n’est pas ce qui manque.

Connaissez votre public

Vous connaissez vos proches. Quelles sont leurs valeurs ? Qu'est-ce qui les intéresse ? Par exemple, s'ils sont catholiques, il pourrait être judicieux d'aborder le discours sous cet angle : Jésus a professé la défense des plus faibles et des plus vulnérables. S'ils sont soucieux de faire ce qui est juste dans la vie, montrez-leur les faits sur la façon dont les Noirs subissent les préjugés raciaux et sont punis de façon disproportionnée par rapport aux Blancs pour les mêmes crimes.

Concentrez-vous sur ce qu'ils disent et font, plutôt que sur qui ils sont en tant que personnes

Dans son livre

Why Won't You Apologize ?

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, la thérapeute Harriet Lerner explique que plus l’infraction est grave, plus il est difficile pour le coupable d'éprouver des remords. Au fond, « lorsque notre identité et notre sens de la valeur risquent d'être diminués ou anéantis, nous ne sommes pas en mesure de présenter de véritables excuses et de faire face au défi que représente le fait de regagner la confiance de quelqu’un. Il est plus facile de nous cacher sous une couverture de rationalisation, de minimisation et de déni pour survivre ». Plus tard, elle écrit : « Une fois que nous étiquetons et stigmatisons les gens, nous réduisons la possibilité de rédemption et de changement positif. »

Gardez ce conseil à l'esprit pour avoir une conversation productive, et dirigez vos critiques sur les actions et les choix d'une personne, et non sur son caractère. Même si avez juste envie de crier

« tu es raciste », dites plutôt « wow, ce que tu viens de dire est très raciste » et expliquez pourquoi.

Précisez que vous n'êtes pas d'accord avec ce qu'ils disent

Les gens entendent souvent ce qu'ils veulent entendre et interprètent tout (sauf un « non » absolu) comme une forme de complaisance. Il suffit donc de dire des choses comme « je ne suis pas d'accord », « c'est tout simplement faux » ou « c'est une chose terrible à dire ». Ne laissez aucune place à l'ambiguïté et exprimez votre désaccord de manière claire. Expliquez que personne n’a le droit de dire aux personnes opprimées quelle est la « bonne » façon de protester. Présentez les nombreux cas documentés d'abus de pouvoir de la part des forces de l'ordre à l'encontre de personnes noires. Soulignez qu’il est indécent de se soucier de l'état d'une chaîne de magasins plus que de la vie des gens

Soyez prêt à fixer les termes de la conversation

Il y a de fortes chances que votre interlocuteur essaie de vous amadouer avec un argument merdique qui s’éloigne du sujet traité, ou qu'il vous accuse d'être intolérant parce que vous ne le laissez pas exprimer sa libre opinion. Ne tombez pas dans le panneau. Maintenez la conversation sur la bonne voie et préservez votre énergie. Ne cédez pas à ses provocations, il ne cherche qu’à attirer l’attention.

Tenez bon

Si vous n'aimez pas les conflits, essayez de surmonter votre malaise et ne vous laissez pas avoir quand la personne vous demande de la laisser tranquille et « d’accepter d’être en désaccord ». Les racistes ont l'habitude d'obtenir ce qu'ils veulent et de ne pas être contestés. Votre entêtement sera votre outil le plus puissant.

Soyez prêt à fixer des limites avec vos proches. Vous pouvez dire : « S'il vous plaît, ne me parle pas comme ça » ou « N'utilise pas ce mot » si votre interlocuteur est vraiment méchant. Vous pouvez ajouter : « Si tu continues d’employer ces termes racistes, je ne vais pas discuter davantage avec toi. » Vous pouvez également dire quelque chose comme : « Je suis vraiment déçu que tu ne veuilles pas reconsidérer ta position sur ce sujet, et, pour être honnête, je n’ai pas envie que mes enfants/amis/partenaires noirs te côtoient si tu as autant de haine dans ton cœur. J'espère vraiment que tu réfléchiras à ce que tu viens de dire. » Et surtout, n’abandonnez pas à la première tentative ratée. Insistez.

Enfin, n'oubliez pas : c’est déjà bien que vos proches soient prêts à en parler

Oui, ces conversations sont incroyablement frustrantes, mais c'est une bonne chose que vos proches soient prêts à discuter et à écouter votre point de vue. S’ils vous tendent l’oreille, n'abandonnez pas : saisissez cette opportunité de rendre le monde un peu plus sûr pour les personnes noires. Mais n’oubliez pas qu’une conversation n'est qu'un début : c'est quelque chose que vous devrez probablement continuer à faire tout au long de votre vie si vous vous engagez dans la lutte contre le racisme sur le long terme.

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