C’est probablement le posse composé des plus vieux membres du graffiti game. D’ailleurs, on les trouve sur le net sous le doux nom de Graffiti Grandmas, mais leur vrai blaze c’est Lata 65. L’initiative s’est faite dans le cadre du WOOL Fest d’Effe et sous la houlette de Lara Rodrigues. Depuis quelques années, cette dernière s’évertue à briser toutes sortes de stéréotypes rattachés aux séniors en proposant des conférences et des workshops de deux jours. À la fin de chaque session, elle emmène sa classe dans la rue mettre pratique ce qui vient d’être dit en s’exprimant, bombes à la main, sur les murs.
Puisqu’il s’agit de vieux marrants, tout le monde en a parlé assez vite, pensant rapidement que le gang venait de Lisbonne alors qu’ils sont — comme tous les gangs — très attachés à leur ville de Covilha. Comme on voulait en savoir plus, on a rencontré Lara, leur chef.
Videos by VICE
The Creators Project: vous pouvez nous expliquer en quelques mots ce qu’est le Lata 65 et le Wool Festival ? Comment sont nés ces projets ?
Lara Rodrigues : Lata 65 est la combinaison de deux grandes passions. Une pour le graffiti et le street art en général et l’autre pour la ville de Covilha, son histoire et son rapport à l’industrie du textile. WOOL, c’est simplement le festival des arts urbains de la ville. On a commencé en 2011.
Depuis, on a grandi et on a reproduit ce type d’actions dans d’autres endroits sous d’autres formes. Que ce soit au Portugal ou à l’étranger. On a eu la possibilité de faire ça parce que ce qu’on propose est simple et facile, c’est dans la nature même du street-art que d’être accessible à tous. Les personnes âgées de la ville sont devenues nos spectateurs puis les acteurs du projet. Ils venaient regarder au lieu d’aller jouer aux cartes. Un jour en parlant du projet à Fernando Mendes (de Cowork Lisboa), il m’a demandé s’il était possible selon moi de faire des workshop pour les séniors.
Et comment a évolué le projet depuis sa création ?
Après le premier workshop, j’ai pu voir à quel point cela apportait aux genres, du coup j’ai décidé de trouver d’autres façons d’exposer les questions abordées et surtout, des façons de financer ce projet. En 2013, nous avons postulé au Participatory Budgeting of Lisbon Council et à l’aide des votes du public, nous avons gagné. En 2014, nous étions invités à un festival aux Acores et nous y avons donné un workshop ainsi que des conférences. À Lisbonne, nous avons commencé récemment 12 actions financées par la ville. J’imagine que c’est pour ça qu’il a souvent été dit que nous venions de Lisbonne au lieu de Covilha. Nous avons aussi d’autres projets en court dans le centre du Portugal : à Castel Branco ou à Coimbra.
Est-ce que vous avez parfois rencontré des avis négatifs de vos « étudiants » vis-à-vis du street-art et du graffiti ?
J’imagine que ceux qui viennent au workshop sont déjà curieux et ouverts d’esprit. Ils ont aussi besoin de réponses quant au graffiti. Ils viennent avec des idées reçues mais ont vraiment envie de mieux comprendre et d’apprendre.
Comment tu décrirais l’ambiance dans le groupe ?
Comme je viens de te dire, la plupart viennent avec un bon esprit. Ils veulent apprendre quelque chose ou alors ont des milliers de questions à poser parce qu’ils n’ont jamais eu la possibilité de demander. C’est une ambiance très relax, la dynamique est donc bonne et ludique.
À quoi ressemble une journée type pour vous et vos « étudiants » ?
LATA 65 est un workshop de deux jours. Quatre heures chaque jour. On est jamais plus de 15 et certain on des problèmes de santé qui font que le rythme est assez lent. Bien plus qu’avec des enfants. La moyenne d’âge des étudiants est de 74 ans, mais ça va de 60 à 95 ans. Le premier jour, on reste à l’intérieur et ça reste assez théorique. On commence à parler du « tag » que l’on va réaliser. On commence aussi des pochoirs. Le deuxième jour, on découpe les pochoirs et on sort dans la ville. On reste sur le mur et tout le monde participe à la fresque.
Raconte-moi les meilleurs souvenirs que tu as de Lata 65.
J’adore raconter les différentes expériences de Lata 65. J’imagine que si je devais ne garder qu’un seul moment, ce serait lors du tout premier workshop en 2012. On avait une dame, Luisa, une ancienne docteur. Elle n’avait jamais fait de pochoirs ou peint dans sa vie, mais le deuxième jour, elle a ramené de chez elle un pochoir, c’est devenu le logo de Lata 65. Depuis ce jour, elle a continué à poser sa marque partout dans la ville et nous aide à développer le projet.
Tout ce qu’il faut savoir sur Lata 65 est sur le site du projet.