Food

On a parlé à la critique de chips la plus pointue du web

Sur son compte Instagram « Critique de Croustilles », Mathilde recense et commente toutes les chips qu'elle déguste.
Alexis Ferenczi
Paris, FR
Critique Chips Insta
Toutes les photos issues du compte Instagram Critique de Croustilles

Comme bon nombre de recettes populaires, la chips a quelques origin stories en magasin. La plus communément admise remonte au mitan des années 1800, quand George Crum, cuisinier afro-américain installé à Saratoga, vexé par la réflexion d’un client sur la taille de ses frites jugées trop épaisses, aurait décidé de couper finement ses pommes de terre avant de le faire frire. Une réponse gourmande qui n’épouse pas forcément le schéma classique des rapports cuisinier contrarié/client mécontent. 

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S’il est permis de douter de l’exactitude de cet acte de naissance, qui jette un voile pudique sur les occurrences de copeaux de patates précédant ceux de Crum, il ne fait aucun doute que la chips a depuis trouvé un deuxième foyer dans l’Hexagone. Chaque année, les Français en boulotteraient 1 kg – chiffre en constante augmentation depuis les débuts de la pandémie – pour éteindre une petite fringale, accompagner le poulet dominical ou simplement ensorcelé par le glutamate monosodique.

Incontournable sur les étals des supermarchés, la croustille se décline dans des combinaisons infinies de marques, de formes et de saveurs. Un constat qui n’effraie pas Mathilde. En novembre 2018, celle qui bosse dans la production de documentaires et de publicités, se lance un défi de taille : faire l’exégèse de chaque chips dégustée. « J’ai une grosse passion pour tout ce qui est goût improbable de chips, raconte-t-elle. Ça me fascine qu’on puisse faire des saveurs pizza ou hamburger. À force d’en manger, je suis partie dans l’idée qu’il fallait absolument que je les référence, soit sur un tableur Excel, soit sur Instagram, pour partager mes impressions avec les potes et, d’une certaine manière, les aider à faire leur course ». 

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Mathilde choisit finalement le réseau social, crée un compte baptisé Critique de Croustilles et publie une photo d’un paquet de chips (Lay’s goût Cheddar & Poivrons par exemple) accompagné d’un avis de quelques lignes (« L’arrière-goût n’est vraiment pas agréable, ce doit être le principe de la cuisson au four. ») ainsi que d’une note (1/5). Pas de jeux de mots lourdingues, mais une précision chirurgicale dans les sensations du palais et des vannes sobres – souvent à l’opposé des goûts choisis.  

« Dans mes critiques, j’essaie de vraiment juger la fidélité au goût, même si je ne l’aime pas, précise Mathilde. Je mettrai toujours quelques points si la saveur s’en rapproche. La chips goût œuf que j’ai testée dernièrement, elle était à l’unanimité assez bof mais comme elle avait vraiment le goût de l’œuf, je ne pouvais pas lui foutre un zéro. » Les critiques font mouche et les abonnés afflux comme les additifs. « Aujourd’hui, j’ai une vraie communauté de gens investis qui commentent, me font des retours et donnent aussi leurs avis. C’est assez cool ».

Vico goût merguez grillé ou Pringles jambon fromage provoquent parfois quelques débats mais pour Mathilde, « tout le monde y trouve son compte », les partisans des chips nature comme les gourmets plus aventureux. « Je pense que la popularité de la chips vient surtout de notre passion très française de l’apéro. Je dirais même qu’on a tendance à ne se nourrir que de ça une à deux fois par semaine, avec une bière ou un verre de vin ». Parfois même en faisant d’une pierre deux coups et en bouffant des Burts goût Guinness.

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Si toutes les chips sont dans la nature, c’est probablement parce que l’aliment de base est le canevas idéal pour des expérimentations gustatives. Mathilde garde d’ailleurs un souvenir impérissable de Bangkok. « Je suis parti y vivre six mois et j’y ai découvert une culture de la chips assez incroyable. Tous les plats thaïlandais sont déclinés en croustilles ».

Sur place, elle fait l’expérience d’une chips Icy Lemon Flavor : « C’était à la fois un goût de pomme de terre et un goût de chewing-gum. En bouche, tu avais un effet frais, du sucré, puis de l’acidulé et à la toute fin de la patate – qui est quand même le principe de la chips. J’ai trouvé ça immonde, se rappelle Mathilde. Ils avaient fait une com’ monstrueuse dans la capitale. Il y avait de la publicité dans les métros, des paquets de chips géants dans les centres commerciaux. Mais j’ai l’impression que les Thaïlandais n’ont pas trouvé ça ouf non plus parce qu’un mois ou deux après la campagne, tu voyais les Icy Lemon Flavor en promo dans les rayons à -70 %. »

Mathilde concède une préférence pour les Bret’s ou les Tyrell’s. « J’aime vraiment cette épaisseur qui donne à mâcher. Quand tu croques dans une bonne chips, tu n’as pas envie de te retrouver avec une ridicule pellicule de patate comme les Lay’s qui sont beaucoup trop fines et font des miettes. J’ai aussi un penchant pour les mélanges sucré/salé un peu piquant. Les Sweet Chili Red Pepper de Tyrell’s, c’est le combo parfait pour moi. »

Si la France est leader européen sur le marché de la chips au goût improbable, Mathilde a un plan pour qu’elle le reste. Un récent sondage effectué auprès de sa communauté a consacré le porc au caramel comme goût de chips le plus attendu, talonné de près par la Flammeküche (loin devant les rillettes de canard). Message envoyé aux producteurs. En attendant de voir naître un jour ces croustilles, Mathilde continue son travail encyclopédique, une chips à la fois.

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