Sin título/Sans titre (Vuelven los demonios/Le retour des démons), 2006, encre sur papier, 90 x 61,5 cm, avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la galerie kurimanzutto, Mexico City
Vice : D’où vient ton nom, Dr. Lakra ? Quel genre de docteur es-tu ?
Dr. Lakra : Quand j’ai commencé le tatouage, vers 1991, je me baladais toujours avec une mallette de médecin, et on m’a donné ce surnom. Je suis lakralogue, un docteur qui donne des lakras aux gens. Regarde dans un dictionnaire. [N.D.L.R. : lakra est un jeu de mots en espagnol entre lacra, qui veut dire une cicatrice, une plaie, et lacra, une expression familière qui signifie fléau, tare. Voilà.]
Tu te vois plutôt comme un tatoueur ou comme un peintre ?
J’ai toujours dessiné, parfois sur de la peau, parfois sur du papier. Quand je fais un tatouage, il y a toujours une interaction avec la victime, et quelque part ça limite le résultat final. La seule différence c’est que le papier ne crie pas.
J’ai entendu dire qu’Ed Hardy t’avait fait un tatouage sur la poitrine il y a une quinzaine d’années.
Oui, il m’en a fait trois, en fait. Un Christ sur la poitrine, une femme pirate sur le bras et une crevette. Et la première fois qu’il est venu au Mexique, il y a environ huit ans, je lui ai tatoué un Quetzalcóatl [un serpent à plumes aztèque].
Juste histoire que les choses soient claires : c’est bien un Christ entouré de démons qui dansent autour de lui en lui pissant sur le visage ?
Oui.
C’est parce qu’un ami à moi t’a vu il y a quelques jours à la London Tattoo Convention.
Oui, je tatouais là-bas.
Tu t’es fait de nouveaux tatouages ?
Oui, genre cinq.
Dans ton travail graphique, on peut faire la distinction entre ces pièces où tu modifies de vieux imprimés de pin-ups des années 1950 et 1960, en y rajoutant des araignées, des crânes et des démons, et puis ces grands dessins et ces peintures comme celles qu’on publie là, dans le magazine.
Ouais, enfin mon boulot c’est un peu plus que ça. Il y a aussi des objets, des collages, et toutes sortes de dessins sur différents supports. Les imprimés améliorés sont les plus connus je pense, mais c’est pas tout. Dans mon travail, je pars des fois d’une base prédéfinie et d’autres fois je commence sur une feuille blanche. Comme ce que je faisais avant de me mettre à tatouer.
Dans certaines de tes pièces, on a l’impression que chaque dessin a été réalisé par une personne différente. Tu t’inspires d’images préexistantes ?
Pour les pin-ups notamment, j’utilise différentes sources iconographiques et on peut y lire plusieurs discours. Les plus grandes pièces (comme celle ci-dessus) ressemblent plutôt à des collages, et les images reproduites sont très proches des originaux. J’aime bien jouer avec les styles et les qualités de dessins. Je pense que ma composition donne un sens nouveau aux images que j’utilise.
Tu juxtaposes constamment sexe et violence, esthétique et grotesque, et, d’une certaine manière, nouveau et ancien.
Dans notre civilisation, le primitif est constamment refoulé d’une manière presque criminelle. Je crois qu’on peut retrouver l’essence même de la culture autour de ces thèmes.
Qu’est-ce qui t’attire dans le design et l’iconographie mexicains des années 1950 ?
C’est pas seulement les années cinquante ou le Mexique qui m’attirent. Je suis simplement fasciné par la manière dont les choses étaient faites avant. Par exemple, la pornographie : j’aime la manière qu’on avait de laisser plus de place à l’imagination. J’aime quand ce qui est censé être le plus important devient secondaire.
C’est comment de bosser à Oaxaca par rapport à Mexico ?
C’est vraiment trop le bordel à Mexico, et il y a trop de sources de distraction pour moi, là-bas. De toute façon, je peux bosser n’importe où.
Tu travailles sur quoi en ce moment ?
Sur des peintures murales à Monterrey, à Glasgow, à la frontière américano-mexicaine et à Mexico.
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