Ma semaine a été insipide. Si insipide que j’ai passé mon temps à écumer le web – plutôt que de me montrer constructive. C’est ce que font les jeunes gens de nos jours quand ils s’ennuient. Ça, où ils dessinent des bites sur les tables des salles de cours. Ma pote appelle ça les « pénis d’écoliers », et bien que ça ne soit pas le genre de trucs qu’il faille taper sur Google (au même titre que « fissure anale » ou « syndrome de Stevens-Johnson »), je l’ai fait.
Breakingboysnews.com est l’un des nombreux sites sordides et dérangeants sur lesquels je suis tombée. Il est principalement composé de faits divers violents, de gros titres relatifs à la sexualité adolescente et de photos de jeunes garçons prépubères à moitié nus qui posent de façon suggestive. Techniquement, il ne s’agit pas de pornographie infantile mais le tout est abject – des photos de garçons de 10 ans en slip de bain légendées avec des titres racoleurs traitant des anus de garçons de 14 ans qui semblent avoir pour but de provoquer des trucs bizarres chez des gens bizarres.
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Il s’avère que le type à l’origine de ce site – Karl Anderson, un artiste suédois – publie aussi une version papier de Breaking Boy News, ainsi qu’un autre magazine où figurent des garçons légèrement plus âgés et des mangas où des hommes mûrs ont des relations sexuelles non protégées avec de jeunes garçons. C’est un peu le Larry Flynt de la sexualité des enfants, et croyez-moi, c’est vraiment pas un compliment. J’ai discuté avec lui pour savoir ce qu’il foutait, sérieux.
Note : Le site web de Breaking Boy News est parfaitement clair sur ce point : les jeunes garçons que l’on peut voir sur les photos qui illustrent les articles n’ont généralement rien à voir avec l’article en question.
La version papier de Breaking Boy News
VICE : Salut Karl. Vous pouvez me parler de Breaking Boy News ?
Karl Anderson : Un jour, une idée m’est venue : « Pourquoi ne pas créer un nouveau tabloïd qui s’intéresserait uniquement aux garçons ? » J’ai fait des recherches sur des faits divers du genre « Crimes de garçons » ou « Viols de garçons », j’y ai ajouté des photos et des titres accrocheurs. L’imprimeur était plutôt surpris.
J’imagine. Mais pourquoi se concentrer sur les jeunes garçons ?
Je vois ça comme ça : tout ce que l’on s’interdit de faire en tant qu’adulte, les jeunes garçons, eux, le font. Ils découvrent des choses, testent leurs limites, peuvent se montrer altruistes, mais ils peuvent aussi voler, violer, même tuer. Mais ils sont mignons. Les garçons sont comme des chatons, c’est difficile de s’empêcher de les admirer.
Quelle est la limite à ne pas dépasser en termes de photo pour ne pas tomber dans la pornographie infantile ?
La pornographie infantile est un terme juridique, pas un point de vue, et rien de ce que je publie ne s’apparente à ça. Je considère Breaking Boy News comme une œuvre d’art. Même quand j’ai créé Destroyer, je n’ai eu quasiment aucun contact avec les modèles – seulement avec les photographes. S’il y a quelque chose de dérangeant, ça ne relève que du fantasme. La réalité est trop terne.
Parlez-moi de Destroyer. Il s’agit de photos de garçons prépubères, pas vrai ?
Destroyer est mon premier projet de publication, et il est né d’une frustration politique ; le mouvement gay est de plus en plus intolérant envers les diverses expressions de l’homosexualité, surtout quand il s’agit d’hommes qui sont attirés par les garçons. Destroyer s’est toujours bien vendu et se vend bien à l’heure actuelle. On compte des lecteurs dans 37 pays de tous les continents, même en Afrique. Breaking Boy News est plus qu’un « projet pour rigoler ».
Qui vous lit ?
Je dirais que 99,99 % de mes lecteurs sont des hommes. La plupart sont des homosexuels, des artistes ou des boy-lovers. Un boy-lover est un homme qui aime les jeunes garçons et qui le revendique. Je n’aime pas beaucoup ce terme, il insinue qu’il existe des personnes qui n’aiment pas les jeunes garçons.
Comment arrivez-vous à vendre vos magazines ? Personne ne doit vouloir de ça dans sa librairie, son kiosque ou son magasin.
Mes publications sont légales. Quelques libraires suédois ont arrêté de vendre Destroyer après que ça a été médiatisé, mais Adlibris – la plus grosse librairie suédoise – a compris que c’était légal et a continué à le vendre. J’ai été attaqué par plusieurs avocats d’enfants, il paraîtrait que je « sexualise les enfants », mais je leur ai expliqué que les adolescents n’étaient pas des enfants, et que ce sont des créatures sexuelles – c’est une chose que j’essaie de véhiculer à travers mon magazine, comme un hommage aux ados. Et puis, que veut dire « sexualiser des enfants » ? Et qu’y a-t-il de mal à ça ? Ce n’est pas un argument recevable.
Un article type de breakingnews.com
Donc vous estimez qu’il est normal de sexualiser les enfants ?
Je pense avoir déjà répondu à cette question. Avant de décider si quelque chose est bon ou mauvais, on doit déjà savoir de quoi on parle.
Quelles sont vos autres publications ?
Je publie les traductions anglaises de deux shotacon. Les shotacon sont des mangas dans lesquels de jeunes garçons ont des rapports entre eux, ou avec des hommes plus âgés. Ce que j’aime dans les shotacon, c’est leur côté fantasmatique. En plus de mettre en scène de très jeunes adolescents, ce qui est illégal dans la réalité, mais ils ne se protègent pas, ont des orgasmes à répétition et semblent éjaculer des litres de sperme, ce qui parfaitement irréaliste. J’adore ça. À mon sens, les fantasmes devraient être aussi extrêmes que possible. Et nous devrions les laisser prospérer.
Des shotacon que publient Karl
Vous vous êtes déjà essayé à ce genre de pratiques ou cela relève du fantasme ?
Je ne préfère pas répondre. Je l’ai fait lors de quelques interviews, mais je ne veux plus exposer ma vie sexuelle en public. C’est intéressant que les gens me posent la question. Personne ne l’aurait fait au Japon – leur perception du fantasme est différente de celle des chrétiens occidentaux.
Ouais, ils sont vachement branchés pédophilie.
S’il vous plaît, le mot qui commence par « P » n’a rien à faire ici. Ça ne m’intéresse pas et ça n’a rien à voir avec mon magazine.
Comment définiriez-vous votre magazine ? Beaucoup de gens le considéreraient comme exclusivement réservé aux pédophiles.
Je fais ce que j’ai à faire et je suis plutôt habitué à être désapprouvé par les gens. C’est marrant qu’ils soient atterrés par ce genre de photos alors que personne ne moufte lorsqu’une ado pose de manière sexy pour la couverture d’un mag.
C’est dû à quoi ?
Je pense que c’est l’aspect homosexuel qui effraie les gens ; un homme qui porte un regard plein de désir sur un garçon provoque un instinct de protection. Les Grecs anciens avaient des relations sexuelles avec de jeunes garçons – c’est de la que vient d’ailleurs le mot « pédagogue » – mais ces derniers devaient rester debout, pour rester dignes et ne pas être assimilés aux femmes. Ce besoin constant de protéger les garçons de tout désir sexuel est emprunt de misogynie.
Ouais, OK.