
Photo: John Waxxx/Neoshrome Prod (DR)
Mouloud a pris un café avec 25G et Seth Gueko. Un million de personnes ont regardé la vidéo de leur duo, «Cabochards», sur Internet. Vous devriez en faire autant, ce truc est fou, crasseux et poissard comme le bidonville de la porte de Bagnolet pendant l’hiver 54.
Vice: C’est quoi «Cabochards»? C’est un clip de gitans, de mecs de Fresnes?
25G: Y’a de tout, des gitans, des SDF, des schizos, des putes. On voulait montrer la zermi sans se voiler la face, ni chialer, faire un truc farfelu, qui existe pas dans le rap.
Seth Gueko: On voulait représenter tous les marginaux. L’état d’esprit vagabond…
En fait, les seules personnes choquées par votre clip sont des rappeurs traumatisés. Ils retiennent tous la même rime: «criaveur de hérisson, cache la drogue dans les couches du nourrisson.»
25G: Ouais putain, c’est celle qui ressort souvent! Pourtant y’a rien de choquant, c’est ce qui se passe vraiment dans la vie, y’a vraiment des gens qui cachent la came dans la couche des bébés.
SG: De toute façon, l’enfant il comprend même pas ce qui se passe, faut arrêter de faire style c’est choquant…
25G: Quand il grandit il sait même pas qu’il y a eu de la drogue dans sa couche, donc tu le perturbes pas le gamin!
Bubba Sparxxx a apporté le trip «campagnard qui rappe au milieu des cochons» au rap US. Toi, dans le clip, on peut te voir dans une bassine d’eau…
25G: Moi, j’ai posé ma roulotte dans le rap game! C’est plus un délire franchouillard qu’américain, mais je comprends qu’on compare à Bubba Sparxxx, sauf que moi c’est du réel.
SG: Nous, c’est le délire white trash français.
Du rap de blanc?
SG: C’est du rap de blanc qui se laisse pas faire, on n’a pas honte d’être blancs. C’est pas du rap de petit gebour, même si ça nous fait plaisir quand les gebour adhèrent, on fait de la musique pour tout le monde, et gebour, c’est pas une ethnie. Avant, j’étais cloîtré dans mon délire de banlieue, j’disais: «Mon rap c’est pas pour les gebour,» mais eux aussi ils ont leurs ambiances, ils sont dans leurs pavs et ils se défoncent la gueule, donc ma musique peut leur parler.
Seth, j’ai beaucoup regardé tes interviews, et c’est toujours surprenant de te voir mêlé à d’autres rappeurs. Tu cultives le personnage?
SG: C’est lunaire. Seth Gueko c’est un tout, c’est une enveloppe. Attends, je commence à parler de moi à la troisième personne, c’est pas bon quand je fais mon Alain Melon. Quand je péra, y’a une gestuelle, y’a des gueules qui vont avec, j’aime bien me démarquer, faire mouche. Mais je suis comme ça, quand tu marches avec moi tu vis le truc! Je lâche des onomatopées dans tous les sens, des «zdaaaax», des «slpaaaouch», des «zbaaaf», des «zdeex»! Pour moi le rap c’est un concours de bites. Je suis pour que tous les rappeurs posent leur bite sur la table, une fois pour toutes.
T’es papa, le rap te rapporte assez pour élever un enfant?
SG: Non, de 1999 à 2004, j’ai connu le boulot, se lever à 5h dans le froid pour un patron qui arrive à 10h, que tu croises pendant ta première pause café, lui il vient juste d’arriver. Il connaît même pas ton prénom, pour lui t’es qu’une fiche de paie. Ça m’a donné une mentale, l’envie d’être mon patron dans ce que j’aime. Ensuite, le rap m’a pris trop de temps donc j’ai dû faire des sacrifices, mais c’est pas grave. Après, tu fais de l’argent à côté, tu te débrouilles. On est sapés comme des milords, mais on n’a pas une roupie en poche!
Seth, c’est quoi ta punchline préférée de 25G?
SG: «Les fouleks tapent des roues en fauteuil roulant!» ou «Sur le terter on vicer on rit noir, ton derrière faut qu’il serve d’urinoir.» Ça me fait golri.
25, préférée de Seth?
25G: «Tu repars du stud avec le string baissé.»
SG: C’est tellement vrai. Et toi?
«Les tass de tece, c’est pas ma tasse de thé!»
Seth Gueko, «Snatch Tape», en rupture de stock. 1er album à venir. 25G, première street tape en préparation.