
Si d’aventure vous avez tué un journaliste mexicain après 1992, vous n’avez désormais plus rien à craindre. Vous pouvez sortir de votre cave et aller bronzer à la plage en toute tranquillité avec vos amis meurtriers car franchement, vous avez de très faibles chances de vous faire pécho. L’année dernière, des mecs en 4×4 ont déposé la tête d’un politicien local devant les bureaux du journal Tabasco Hoy. Depuis, plusieurs journaux ont fermé suite à des jets de grenades. Pour un journaliste, le Mexique est la deuxième destination la plus dangereuse au monde, après l’Irak. Omar Rabago Vital travaille au CENCOS, une organisation qui lutte pour protéger la liberté de la presse.
Vice: Bonjour Omar. J’ai appris ce qui s’était passé au Tabasco Hoy. Ça fait peur…
Omar Rabago Vital : Le plus bizarre, c’est que la police n’a jamais fait d’enquête sur cet « incident » et que les employés de Tabasco Hoy n’en ont jamais réclamé une.
Attendez… Vous voulez dire que quelqu’un a déposé une tête coupée dans un bureau et que personne n’a voulu trouver les responsables ?
C’est ça. En 2007, on a enregistré 64 cas d’intimidation de journalistes. La plupart sont des attaques physiques… Trois journalistes ont été assassinés l’année dernière mais aucune de ces enquêtes n’a aboutie. De plus, ces crimes sont passés sous silence.
Mais qui menace les journalistes ?
D’après nos enquêtes, 48 % des intimidations proviennent de membres du gouvernement, alors que 14 % sont reliées à diverses organisations criminelles. Le reste, on ne sait pas.
Donc la police ne sert à rien…
Exactement. D’ailleurs, elle est elle-même responsable de certaines de ces attaques. Et quand les victimes cherchent à témoigner, les enquêtes n’aboutissent pas. Il y a parfois quelques procès, mais les sentences touchent seulement des individus, et non les groupes ou les organisations criminelles.
C’est déprimant… La situation est-elle complètement désespérée ?
Il y a eu un peu de progrès en 2006, quand le gouvernement mexicain a créé des organisations pour la liberté de la presse… Mais elles n’ont jamais assez de pouvoir pour s’occuper de tous les crimes, donc finalement ça ne suffit vraiment pas.
Et vous-même, vous n’avez pas peur de nous raconter tout ça ?
Je n’ai pas peur, mais je suis très prudent. Ces gens sont puissants. Au CENCOS, nous prenons les précautions nécessaires pour notre sécurité personnelle. Quand on quitte la capitale, on doit prévenir le bureau de toutes nos allées et venues au cas où l’on disparaîtrait. Ce sont les journalistes qui sont le plus en danger. Mais nos lignes téléphoniques sont souvent sur écoute, des types bizarres traînent devant nos bureaux et puis de temps en temps on se fait suivre par des voitures sans plaque d’immatriculation. Beaucoup de gens importants n’apprécient pas du tout ce que l’on fait, mais ne comptez pas sur moi pour les nommer…
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