Versailles n’est plus seulement un nid à touristes avides de selfies dans la galerie des Glaces, c’est aussi devenu le nouveau terrain de jeu des grands de l’art contemporain. Après Jeff Koons, Takashi Murakami et Anish Kapoor, c’est donc au tour de l’artiste dano-islandais Olafur Eliasson d’envahir le château et les jardins du Roi Soleil, avec ses célèbres installations-miroirs et ses cascades.
Le Versailles d’Eliasson comprend trois installations en jardin et six autres en intérieur, réalisées après des repérages par l’artiste. « Olafur a choisi pour Versailles des œuvres qui soulignent l’importance des miroirs et de l’eau, et spécialement le rôle qu’a joué la vue dans l’histoire du lieu — les miroirs rendent visibles le moindre mouvement, le jardin était construit selon des axes visuels », raconte Martin Enoch du Studio Olafur Eliasson à The Creators Project. « C’était un endroit de pouvoir et de contrôle. L’intervention d’Eliasson a pour but de transformer l’expérience par l’action des visiteurs. »
Videos by VICE
Dehors, le premier travail d’Eliasson, Fog Assembly, est un cercle de brume. La structure circulaire diffuse un brouillard, afin d’« amplifier le sentiment de fugacité et de transformation ».
Glacial Rock Flour Garden est aussi fait d’eau, mais à l’état solide. Le bassin du Bosquet de la Colonnade est couvert de résidus de glacier, des sédiments de roche issu de l’érosion du glacier. Eliasson reprend ainsi une thématique qu’il avait déjà implantée à Paris avec Ice Watch, au moment de la COP21.
Les visiteurs peuvent trouver de l’eau liquide cette fois avec une cascade géante installée dans le Grand Canal — l’installation la plus spectaculaire de l’exposition. Waterfall est constituée d’une tour qui pompe de l’eau avant de la laisser se déverser avec fracas dans le bassin. « La cascade réalise un rêve du jardinier du Roi, paysagiste de Versailles, André Le Nôtre. Il y a des dessins dans lesquels il imagine une cascade dégringolant dans le Grand Canal », explique encore Enoch.
Dans le château, voulu par le roi Louis XIV en 1623, les œuvres d’Eliasson prennent un tout autre visage. Reprenant son travail sur le miroir, en écho bien sûr avec l’iconique galerie des Glaces, Eliasson a installé six installations conçues pour « défier notre vision du monde à travers une lumière projetée, des vues kaléidoscopiques, des miroirs et des sculptures géométriques complexes », dit le commissaire de l’exposition, Alfred Pacquement.
Afin de désorienter et intriguer le spectateur, Deep Mirror (Yellow) et Deep Mirror (Black), structures circulaires équipées de lumières et de peinture noire, jouent sur les surfaces réfléchissantes de la galerie. The Curious Museum crée l’illusion d’être face à soi-même sur un balcon. Solar Compression utilise la lumière et un miroir convexe pour imiter un corps céleste.
Eliasson a également installé dans la galerie des Glaces Your Sense of Unity, une série de miroirs circulaires soulignés de LEDs qui reflètent et réfractent le décor environnant.
The Gaze of Versailles est l’installation finale. C’est la plus petite mais sans doute la plus fascinante. Toujours dans le thème du reflet, Eliasson a créé deux petits globes dorés, faisant penser à une paire d’yeux, sur une fenêtre donnant sur les jardins. Peut-être s’agit-il là d’illustrer le regard inquisiteur du Roi Soleil, qui régnait d’une main de fer sur ses courtisans — qu’il a fait venir au château de Versailles pour mieux les surveiller. « Garde tes amis près de toi, et tes ennemis encore plus près ».
Son quotidien, réglé par une étiquette rigide, était extrêment précis. Louis XIV avait même une vision très stricte de la façon dont les visiteurs devaient voir le jardin. « Le Versailles dont j’ai rêvé est un lieu qui donne du pouvoir à tout le monde. Il invite les visiteurs à prendre le contrôle sur l’autorité de leur expérience plutôt que simplement consommer et être ébloui par la grandeur », conclut Eliasson.
Les installations d’Olafur Eliasson sont au château de Versailles jusqu’au 30 octobre 2016. Plus d’infos en cliquant ici.